Quel choc ! La doctoresse me tendit une boîte de
mouchoirs et me présenta le Chirurgien Oncologue, qui allait
m'opérer.
Je fis entrer mon époux, puis l'oncologue me dit :
- Madame, nous sommes surpris, car une masse dure mobile, en
général, n'est pas cancéreuse. De plus les cellules sont agressives
au stade 3.
Désolés, mais nous allons enlever la masse et nous
devrons prendre "les gros canons", qui sont la chimio, la radiothérapie ; vous allez perdre vos cheveux.
Je demandai alors quels étaient mes chances de survie. Il me
répondit:
- Les chances de survie ! Nous gardons toujours un large espace.
Pour nous médecins, un cancer est un cancer et nous ne lisons pas
dans les boules de cristal.
Après avoir rempli les formulaires, nous sommes
revenus à la maison. Je me sentais comme empaquetée dans une écharpe
de plomb. Le téléphone sonnait, mais je ne l'entendais pas ; je
savais que c'était ma mère alors âgée de 84 ans. Elle savait que
j'attendais le diagnostic, mais je ne voulais pas lui faire mal.
Je restais assise sur mon divan, regardant l'horloge ; elle semblait
s'être arrêtée. Je n'étais pas capable de parler. Finalement je
répondis au téléphone qu'il n'y avait rien de spécial, que tout
était beau. Mais elle connaissait sa file ...
Puis le courage m'est revenu, car ma mère a bien
pris la nouvelle en évoquant des cas de réussite dans des situations
comme la- mienne.
Mais le pire dans ma maladie, a été de me sentir coupable d'avoir
annoncé à ma mère de quoi j'étais atteinte, car une semaine plus
tard, elle succombait à un AVC, et c'est moi qui lui ai fermé les
yeux... Mais savez-vous que je pleure en écrivant ces lignes que je
partage avec vous ; et cela me fait du bien. je n'avais jusqu'ici,
jamais confié cela à personne.
Mon médecin de famille qui était aussi celui de
ma mère, m'a consolée en me disant "Diane, tu sais que ta mère a fait
des AVC pendant dix ans. On a toujours dit à votre
famille que son médicament ne la sauverait pas toujours. Elle me
prit la main pour ajouter "elle a juste été chanceuse pour s'être
rendue à l'âge de 84 ans.
Mais la famille ne le voyait pas ainsi. Je sentais leurs flèches de
feu dans leurs yeux ; un regard qui fait que tu te sens coupable. Ma
sœur ainée m'a carrément mis le décès de notre mère sur le dos, en
me disant :
- Si un jour je reçois un diagnostic de cancer,
je n'en parlerai à personne. Et surtout si c'est un cancer du
sein. Nombreuses sont les femmes qui en sont atteintes, et la
plupart s'en sortent. Moi, je n'aurais jamais dit cela à maman.
Quand son mari eut le cancer, elle m'a dit comprendre à quel prix
j'avais dû souffrir de l'attitude de tous à travers mon cas.
Mais il était un peu tard. Je pardonne tout, mais je ne leur rends
pas visite. C'est là que m'est venu mon rêve d'écrire. Mon roman
s'intitule "Un si grand pardon". Peut-être avais-je beaucoup à
pardonner.
Mais il y a autre chose que j'aimerais partager avec vous. Il y a eu
ma mère, et comme un malheur n'arrive jamais seul, il y a aussi mon
fils cadet porté disparu, victime des méchants de la drogue.
Pendant trois ans nous l'avons cherché en vain malgré l'aide de la
police, de mon époux et d'un ami que j'adore. Mon fils aîné qui est
militaire m'a aidée là aussi comme dans la maladie..
Alors, il me fallait écrire. je me suis oubliée, j'ai oublié toutes
les épreuves et le cancer qui m'habitait. Car tout cela ressemble à
une histoire qu'on raconte, mais c'est un fait réel. J'ai la foi et
je sais que ce qui nous est enlevé nous revient...
Je peux aujourd'hui vous confier qu'il y
a maintenant dix ans, notre fils a été retrouvé. Le deuil de ma mère
est fait même si elle habitera toujours mon cœur. Mon cancer est
parti. Je suis guérie !
Voilà ce récit que j'ai intitulé "Raz-de-marée" pour ce que mes
épreuves ont été violentes.
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